Peu d’archives évoquent les diverses façons dont les femmes ont contribué à la révolution haïtienne qui aboutit le 1er janvier 1804 à l'indépendance d’Haïti.
Pourtant, en août 1791, lorsque les esclaves de Saint- Domingue se soulèvent, des femmes participent à l’insurrection et aux combats armés. Certaines sont au coeur de la stratégie conçue par Toussaint Louverture pour organiser des guérillas contre les Français dans les territoires intérieurs de l’île. Aux côtés de Sanite Bélair, de nombreuses femmes telles Défilée (appelée également Dédée Bazile), Catherine Flon, ou encore Claire Heureuse, épouse de Jean- Jacques Dessalines, se sont illustrées par leur bravoure et leur courage.
Sanite (ou Sanité), surnom de Suzanne, était une jeune affranchie originaire des Verrettes qui épousa en 1796 Charles Bélair, neveu, aide de camp et lieutenant de Toussaint Louverture.
Après la soumission et l'exil forcé de Toussaint, elle participe aux côtés de son époux aux combats de 1802, dans les retranchements escarpés des Matheux, contre l’expédition napoléonienne menée par le général Leclerc venue rétablir l’esclavage dans la colonie de Saint-Domingue.
Lors d’une attaque surprise contre les troupes de Charles Bélair parties en quête de renforts et de munitions, Sanite fut faite prisonnière. Désespéré, Charles se rendit. Le couple Bélair fut expédié à Leclerc, sur ordre de Dessalines, conservant un espoir de possible clémence de Leclerc. Ils furent condamnés six heures après leur arrivée au Cap.
La commission militaire « considérant le grade militaire de Charles et le sexe de Sanite, son épouse, condamna ledit Bélair à être fusillé et ladite Sanite, sa femme à être décapitée ».
Un des chefs d’accusation retenu contre Sanite concernait l’exécution d’un jeune blanc capturé par les troupes de Bélair et soupçonné d’espionnage. Pour l’accusation, les rebelles, en route pour les mornes de l’Arcahaie, « n’avaient pas parcouru un espace de cents toises que la citoyenne Sanite (...) déclara hautement qu’elle ne voulait pas donner des soins plus longtemps » à ce jeune Blanc. Ce dernier fut « tué à coups de sabre par les soldats de la huitième ». Mais pour l’acte d’accusation, « Sanite, la brigande, avait de ses propres mains, sabré ce jeune blanc. »
« Quand on le (Charles Bélair) plaça devant le détachement qui devait le fusiller, il entendit avec calme la voix de son épouse l’exhortant à mourir en brave. Au moment qu’il portait la main sur son coeur, il tomba, atteint de plusieurs balles à la tête ». Le jour de l’exécution, le 5 octobre 1802, Sanite exigea et obtint, non sans peine, de ses bourreaux d’être fusillée. « Sanite refusa de se laisser bander les yeux. Le bourreau, malgré ses efforts, ne put la faire courber contre le billot. L’officier qui commandait le détachement fut obligé de la faire fusiller. » (Th. Madiou, Histoire d'Haïti, t; 2, 1847, p. 329).
Sources d'informations
Thomas Madiou, Histoire d'Haïti, t.2 , cité par CLAUDE-NARCISSE, Jasmine (en collaboration avec Pierre-Richard NARCISSE), Mémoire de Femmes. Port-au-Prince : UNICEF-HAITI, 1997. https://www.haiticulture.ch/Sanite_Belair.html
Exposition 10 femmes puissantes du Mémorial de l’abolition de l’esclavage de Nantes https://memorial.nantes.fr/2013/05/10/exposition-dix-femmes-puissantes/