Exposition «Oser la liberté.
Figures des combats contre l’esclavage»

Proposée à l’initiative du Centre des monuments nationaux et de la Fondation pour la Mémoire de l’Esclavage, l’exposition Oser la Liberté retrace l’histoire d’un combat : celui de la liberté contre l’esclavage dans l’histoire de France, une marche qui s’est déployée sur quatre siècles et trois continents, scandée de moments de ruptures, de régressions, de temps forts et de bascules.


En mêlant cette histoire foisonnante à celle de la modernité française dont elle est une page majeure, et en convoquant la mémoire des femmes et des hommes qui l’ont écrite, l’exposition montre comment le système colonial esclavagiste a toujours suscité résistances et oppositions, et combien le souffle des figures héroïques qui les ont portées continue d’inspirer les combats d’aujourd’hui.

Une exposition à découvrir au Panthéon, Paris du 9 novembre 2023 au 11 février 2024

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Toussaint Louverture, François Cauvin, 2009


Jean-Baptiste Belley, 1797, Anne-Louis Girodet de Roussy Trioson.  © RMN-Grand Palais

Oser la Liberté

L’expression évoque l’audace de ces femmes et de ces hommes, illustres ou méconnus, qui ont osé se dresser contre l’esclavage, dans les colonies comme en métropole. Elle raconte comment, dans le premier empire colonial français, l’irrépressible volonté de liberté des esclaves révoltés et les idéaux universels des Lumières se sont rencontrés.

Après 1789, c’est en effet dans les colonies françaises en révolution que la réalisation d’un programme de « Liberté générale » a été poussée le plus loin, quand l’insurrection générale du 23 août 1791 dans la colonie de Saint-Domingue (aujourd’hui Haïti) a provoqué cet événement inédit dans l’histoire humaine : le premier soulèvement d’esclaves qui parvient à imposer l’abolition de l’esclavage.

Rien n’effacera la puissance de ce moment, pas même la décision de Napoléon Bonaparte de rétablir l’esclavage en 1802, et l’exposition montre comment le combat pour l’abolition sera finalement gagné, et prolongé jusqu’à nos jours dans le projet d’une société qui œuvre à l’idéal de liberté, d’égalité et de fraternité.

Une exposition incarnée

Dans le Panthéon, temple des héros et des héroïnes de la République, l’exposition « Oser la Liberté » raconte cette histoire en l’incarnant. 

A travers la présence de celles et ceux qui y sont déjà honorés – comme l’abbé Grégoire et Condorcet, Toussaint Louverture et Louis Delgrès, Victor Schœlcher et Félix Éboué, Aimé Césaire et Joséphine Baker… – mais aussi à travers l’évocation de figures moins connues dont elle fait revivre le souvenir (Olympe de Gouges, Makandal, Julien Raimond…), pour un récit plus juste, plus ouvert, plus complet.

Cette exposition les réunit toutes et tous pour la première fois au Panthéon, à travers un dispositif inédit mêlant archives, œuvres et dispositif sonore et visuel. 

Panthéon  © Centre des monuments nationaux

Oser la liberté, c’est l’histoire d’une conquête, à la fois visible et dérobée, dont l’actualité continue d’inspirer nos luttes quotidiennes contre la tyrannie des passions haineuses, des pouvoirs autoritaires, des idéologies mutilantes qui sapent la cohésion sociale et sèment la discorde. Car le dispositif hégémonique de systèmes juridiques, économiques ou politiques hérités du passé laisse apparaître en creux le cheminement d’une indomptable aspiration à la liberté à travers les siècles et les continents, sans exception dans l’espace ou dans la durée. L’exposition retrace la généalogie de cet idéal conquis et partagé.

Florence Alexis, commissaire de l’exposition.


UN PARCOURS EN QUATRE SÉQUENCES

La traite esclavagiste, une première mondialisation


À partir du XVe siècle, l’expansion des puissances européennes sur tous les continents conduit à la constitution d’immenses empires coloniaux. Le moteur de cette première mondialisation économique est la plantation esclavagiste. Ce système de production est massivement développé dans les colonies d’Amérique et d’Asie pour fournir à l’Europe les produits coloniaux qu’elle convoite : sucre, café, tabac, cacao, épices, coton... Les peuples autochtones décimés par les massacres, la servitude et le choc microbien, c’est en Afrique que, à partir de 1444, les Européens vont capturer une main d’œuvre de 13 millions de femmes, d’hommes et d’enfants achetés et déportés à travers les océans pour être transformés en bêtes de somme par la traite, sur plus de 400 ans. Au XVIIe siècle, la France affirme sa volonté de se positionner en acteur majeur de cette économie-monde à partir de ses colonies aux Antilles, en Louisiane, en Guyane et dans les Mascareignes, où, de marronnages en révolutions, les esclaves ne cessent de résister à ce système déshumanisant. 

Lettre de Toussaint Bréda dit Louverture, 8 août 1793  © Walter O. Evans Foundation For Art and Literature

Marronnages, Lumières et Révolution (1750-1802)


À la fin du XVIIIe siècle, les sociétés esclavagistes de l’empire colonial français sont à leur apogée économique. Mais c’est aussi l’âge d’or des résistances, révoltes et insurrections. Les esclaves pratiquent partout le marronnage. Allant jusqu’à créer de véritables contre-sociétés, les libres de couleur sont discriminés en raison de leurs origines et les philosophes des Lumières condamnent l’inhumanité de l’esclavage. La proclamation des Droits de l’Homme - « Tous les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. » - fait exploser le système colonial. À Saint-Domingue, ce sont les esclaves révoltés qui accomplissent les promesses de 1789 en imposant l’abolition, que la Convention Nationale confirme et étend le 4 février 1794 au reste de l’empire colonial français. Elle porte Toussaint Louverture, qui s’est affranchi de l’esclavage, à la tête de la colonie. Il devient l’acteur et l’emblème de cette « Liberté générale » que la Première République s’efforce d’organiser en inventant une société sans esclavage dans ses possessions outre-mer

D’une abolition à l’autre (1802-1848)


En 1801, Toussaint Louverture dote Saint-Domingue d’une constitution qui interdit l’esclavage. Napoléon Bonaparte, qui nourrit de grandes ambitions coloniales en Amérique, décide de le renverser pour mettre un terme à la Liberté Générale. Il échoue à Saint-Domingue, qui gagne son indépendance sur le champ de bataille et la proclame en 1804 sous le nom d’Haïti. Mais il réussit à rétablir l’esclavageen Guadeloupe et en Guyane. Il le maintient en Martinique et à La Réunion, où les colons voulaient maintenir l’ordre ancien. Pendant 46 ans, la lutte reprend dans les colonies françaises comme en métropole. La traite, l’esclavage et son corollaire, le préjugé de couleur, sont contestés dans la presse, devant les tribunaux, au Parlement, parfois les armes à la main lorsque les esclaves se soulèvent. Des figures émergent pour incarner ces combats, comme Cyrille Bissette, Furcy Madeleine, ou Victor Schœlcher. Mais face à l’inertie du pouvoir central, il faudra une nouvelle révolution pour abattre la traite en 1831, et une autre pour enfin abolir l’esclavage, en 1848.

Portrait de Victor Schoelcher par Henri Decaisne, 1833.
 © Commune de Fessenheim

Contre l’oubli : commémorer et combattre (depuis 1848)


« Je recommande à chacun l’oubli du passé », déclare le gouverneur de Martinique en 1848. Une injonction qui vise autant à préserver la paix civile qu’à masquer la persistance des inégalités dans une société coloniale dont les structures économiques n’ont pas été réformées. Alors que l’école républicaine permet à une nouvelle élite de s’élever, celle-ci se saisit de la mémoire de l’esclavage pour contester le racisme qui en est issu et affirmer une « conscience noire » longtemps incubée, que Paulette et Jane Nardal, Aimé et Suzanne Césaire, Léon-Gontran Damas, portent dans des textes importants. Après-guerre, les espoirs déçus de la départementalisation des « vieilles colonies » en 1946 et le mouvement parallèle de la décolonisation, porté notamment par le martiniquais Frantz Fanon, nourrissent les revendications pour une pleine égalité outre-mer, et l’aspiration à une société enfin délivrée du racisme. En 2001, la France reconnaît par la loi « Taubira » l’esclavage et la traite comme crimes contre l’humanité : un retour aux sources de 1794 et 1848, et un appel à l’action pour l’égalité et la dignité de la personne en France comme dans le reste du monde, alors que la traite et l'esclavage moderne touchent encore plus de 28 millions de personnes dont près de 70% de femmes dans le monde.

Le combat pour la liberté et l’égalité n’est pas achevé.


Informations pratiques

A découvrir au Panthéon du 9 novembre 2023 au 11 février 2024 (tous les jours de 10 h à 18 h)

Dernier accès 45 minutes avant la fermeture. 

  • Tarif individuel : 11,50 €
  • Tarif groupe (sur réservation) : 9 €

Un catalogue est publié à l’occasion de l’exposition par les Éditions du Patrimoine.
182 pages, 150 illustrations. Prix de vente : 40 € environ

Des visites commentées de l’exposition par sa commissaire, Florence Alexis, ainsi qu’un cycle de conférences sont proposés autour de l’exposition.

Visites commentées par la commissaire :

  • le 18 novembre 2023 à 11h00
  • le 9 décembre 2023 à 15h00
  • le 20 janvier 2024 à 11h00.

La FME bénéficie pour cette exposition du soutien : 

  • du ministère de l’intérieur et des outre-mer 
  • du secrétariat d’Etat chargé de la citoyenneté et de la ville 
  • de la Fondation TotalEnergies 
  • du crédit industriel et commercial (CIC) 
  • de la caisse des dépôts et consignations