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Bataillon Créole : Raphaël Confiant raconte les antillais dans la Grande Guerre
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Né en Martinique en 1951, Confiant Raphaël, est un écrivain, professeur et militant de la cause créole. Son engagement se traduit par ses travaux universitaires, ses écrits littéraires (en 1985, il est le premier Martiniquais à publier un roman en créole, Bitako-a ; il publiera également un dictionnaire du créole martiniquais) et son rôle dans la lancement du mouvement de la créolité, dont il signe en 1989 avec Jean Bernabé et Patrick Chamoiseau le manifeste littéraire, Eloge de la créolité. Depuis 1988, il publie également des romans en français, dont plusieurs ont été couronnés par des prix littéraires.

Le « Bataillon créole » était la dénomination officielle des régiments antillo-guyanais et réunionnais engagés dans la première guerre mondiale. Près d’un cinquième de ces soldats perdront la vie sur le front européen ou celui d’Orient. En se basant sur les archives de la bibliothèque Schœlcher de Fort-de-France, Raphael Confiant s’attache à faire vivre la guerre au lecteur à travers les épreuves de ces soldats, l’effroi des combats mais aussi le racisme et les discriminations, et les blessures physiques et psychiques que la guerre leur laissera ainsi qu’à leur famille, dans un récit polyphonique où il fait dialoguer les genres et les formes, le créole et le français, la lettre du poilu et les plaintes de sa mère.

Engagés au sein du Bataillon pour défendre la « mère patrie » alors que la plupart n’avait jamais vu le sol européen, leur volontarisme pourrait étonner aujourd’hui. Mais Raphaël Confiant rappelle qu’aux yeux de ces Martiniquais dont les parents et grands-parents avaient connu l’esclavage, cette exploitation émanait davantage « des Békés ou des Blancs créoles que de l’État français. » A travers l’évocation de leur destin tragique, Raphaël Confiant ne cherche pas seulement à redonner vie à ces hommes morts loin de leur terre natale, dont les noms sont gravés sur les monuments aux morts aux Antilles et en Guyane mais dont l’existence et l’engagement restent peu connus dans l’Hexagone (une intention illustrée par la phrase finale du roman : « Ainsi d’oubli, il ne sera jamais plus question… »), il inscrit aussi ce récit dans l’ambitieux projet de « Comédie Créole » qu’il a entamé en 1988 avec son roman Le Nègre et l’Amiral, par lequel il entend décrire les multiples composantes de ce qui en est venu à former le peuple martiniquais.

Roman de guerre autant que roman du colonialisme, imprégné par l’empreinte de l’esclavage et par les fractures et les incompréhensions entre l’Hexagone et les outre-mer, Bataillon créole ressuscite un moment capital et méconnu de la mémoire de la Martinique et de la France.

Le roman Bataillon créole : guerre 1914-1918, de Raphaël Confiant paraît en 2013. Mêlant sources historiques et fiction, il rend hommage aux milliers de soldats antillais qui combattront les Allemands durant la Grande Guerre, en donnant une voix tant aux combattants qu’à leur famille qu’ils ont laissée.