Boris Gamaleya, Réunionnais météore et poète.
Né le 18 décembre 1930 à Saint-Louis sur l’île de la Réunion, Boris Gamaleya est un poète, écrivain et dramaturge réunionnais dont l’œuvre est inspirée par son parcours, entre quête identitaire, exil, deuils et politique.
Fils d’un Ukrainien apparenté à Pouchkine et refugié à la Réunion après la révolution d’octobre, mort alors qu’il est enfant, et d’une Créole aux origines portugaises lointaines, Boris Gamaleya sera élevé principalement par sa grand-mère à Makes puis chez ses grand-oncle et tante, à la Rivière Saint-Louis.
Adolescent tourmenté, il découvre le poète originaire de la Réunion, Leconte de Lisle, au lycée qui porte son nom, et publie ses premiers poèmes dans les journaux L’Avenir du Sud, Le Peuple et La Démocratie lors de ses études secondaires à Saint-Denis.
Après la 2ème guerre mondiale, il poursuit ses études universitaires en hexagone. De retour sur son île natale en 1955 avec sa femme Clélie, une professeure de lettres, et leur fille Ariane, il enseigne le français, commence à s’intéresser à la culture orale réunionnaise et publie en parallèle des poèmes et des essais dans la presse.
Militant du parti communiste réunionnais dès sa création en 1959, il témoignera de son engagement dans un long poème, La Mer et la Mémoire – Les Langues du magma (1978), qui narre les fureurs de l’histoire de 20ème siècle, de la révolution bolchevique aux années 1970, dans le monde et à la Réunion, et où il rend hommage à François Coupou et Rico Carpaye, des manifestants réunionnais tués en 1958 et 1978.
Il aura entre temps connu 12 ans d’exil hors de La Réunion, du fait de l’ordonnance Debré du 15 octobre 1960, qualifiée de « scélérate » par Aimé Césaire, qui disposait que « les fonctionnaires de l’État et des établissements publics de l’État en service dans les DOM dont le comportement est de nature à troubler l’ordre public peuvent être, sur la proposition du préfet et sans autre formalité, rappelés d’office en métropole par le ministre dont ils dépendent pour recevoir une nouvelle affectation ».
Depuis l’Hexagone, il rejoint l’UGTRF (Union générale des travailleurs réunionnais en France), écrit dans sa revue, et parvient à faire lever sa mesure d’éloignement après une grève de la faim en 1972. De retour à La Réunion, il publie Vali pour une reine morte, une œuvre puissante dans laquelle il évoque l’histoire de l’île et célèbre la légende des Noirs Marrons, premiers résistants à l’esclavage, qui lui vaudra même des comparaisons avec Aimé Césaire.
Avec les années sa réputation grandit, tandis qu’il s’éloigne du militantisme politique pour embrasser une « géopétique » qui le voit brasser toute la complexité culturelle de La Réunion et de l’Océan Indien, et se pénétrer de plus en plus profondément de la richesse naturelle de l’île, faune, flore, reliefs, climat.
En 1997, il remonte le fil de ses origines slaves avec le « ro-ème » L’île du Tsarevitch où il évoque le destin de son père, sa propre identité métissée et sa foi orthodoxe. L’année suivante est marquée par une commande très symbolique pour l’ancien militant banni de son île pour ses opinions politiques : l’Etat lui commande une création pour marquer de 150ème anniversaire de l’abolition de l’esclavage, Ombline, ou le volcan à l’envers, un oratorio dont il signe le livret inspiré d’une pièce de théâtre qu’il a écrite dans les années 1980, et qui sera créé par le grand orchestre de Radio France.
Ses dernières années sont celles de la consécration, avec de nombreux hommages et ouvrages ou revues consacrés à ses œuvres, et un créativité toujours débridée, qui le renvoie sur les chemins de son enfance, toujours en célébrant la beauté de son île, à vol d’oiseaux, motif récurrent de son inspiration.
Il meurt le 30 juin 2019, à Barbizon où le grand âge l’avait fait se rapprocher de sa fille. Après son décès, son île lui rendra hommage notamment à travers l’exposition « Boris Gamaleya, Magma et Météore » inaugurée à la Bibliothèque départementale.