En bref
Créateur de l'œuvre Théo Bonev
Historique
Femme noire, celle que l'on surnomme Lady Liberty a été dévoilée à l'occasion du 159ème anniversaire de l'abolition définitive de l'esclavage sur les territoires français.
Dans sa main gauche, elle tient une lampe à gaz, comme si elle ouvrait la voie et guidait ses confrères et consœurs réduits en esclavage.
Saint-Martin et l'esclavage
Découverte par Christophe Colomb le 11 novembre 1493 le jour de la Saint-Martin, l'île fut baptisée du même nom. Deux siècles plus tard, l'île est séparée en deux : la partie Nord revient à la France tandis que la partie Sud est donnée à la Hollande. Sans animosité, les deux Nations profitent ainsi des riches ressources de Saint-Martin.
Les premiers esclaves de l'île arrivent au XVIIème siècle, avec la chasse de colons hollandais par les Portugais du Brésil. Ceux-ci se réfugient en Martinique, mais principalement en Guadeloupe et à Saint-Martin, avec leurs esclaves. Détenteurs du savoir-faire de la fabrication du sucre, les Hollandais sont à l'origine de l'essor économique de l'île. Le peuplement se poursuit avec des colons, corsaires anglais et quelques personnes noires réduites en esclavage, venues des îles voisines.
Saint-Martin subit de nombreuses attaques anglais et sera successivement occupée et abandonnée, à coup d'évacuation, de pillage, et autres violences. Entre 1775 et 1784, la population blanche se développe de 300 habitants à 500, tandis que les personnes réduites en esclavage, déversée par le commerce ou amenée des îles voisines, doublent de 1000 à 2500.
L'esclavage est aboli sur les territoires français par le décret du 27 avril 1848 de Victor Schoelcher. Rapidement, le gouverneur de la Guadeloupe, dont Saint-Martin dépend, applique le décret le 27 mai 1848. Néanmoins, la Hollande n'abolit l'esclavage que 15 ans plus tard. De fait, de nombreux esclaves ont cherché à franchir la frontière de Sint-Marteen (Hollande) à Saint Martin (France) pour obtenir leur liberté.
Mémoire
Lady Liberty est une allégorie de la liberté. Son nom est aussi le surnom de la fameuse Statue de la Liberté de New York, sur Liberty Island. Toutes deux porteuses d'un message de liberté, les statues semblent pourtant dialoguer de façon plus complexe.
La Lady Liberty américaine, offerte par la France en 1886, promet un espoir de justice, d'égalité et de liberté sur le territoire états-unien : les chaînes à ses pieds rappellent la promesse de rompre avec l'esclavage (alors qu'un siècle de régime ségrégationniste débutait à la même époque). Mais la Statue de la Liberté reprend des canons européens, d'abord suivant les codes artistiques des allégories antiques grecques, drapées et solennelles, le nez droit et fin, les lèvres minces. Une liberté donc, en écho à l'esclavage, mais incarnée par une femme européenne mythologisée.
La Lady Liberty de Saint-Martin est une femme noire, troquant son flambeau héroïque par une lanterne, guidant ses frères et soeurs esclaves vers la liberté. Elle personnifie une liberté acquise par les esclaves eux-mêmes, par leurs luttes, soutenus par les abolitionnistes et militants d'hexagone. L'oeuvre de Théo Bonev rend ainsi la parole aux premiers concernés par le système esclavagiste et colonial.
La statue est régulièrement le lieu de la cérémonie de commémoration de l'abolition de l'esclavage, le 27 mai. Cette date est d'ailleurs contestée car les Archives attestent que l'abolition est intervenue un jour plus tard à Saint-Martin, le 28.
La cérémonie est l'occasion de rappeler le devoir de mémoire de l'île, de l'histoire commune de ses habitants, descendants d'esclaves. Elle donne lieu à des dépôts de gerbes, des allocutions, des concerts et spectacles de danse autour d'un même thème fondamental : la Liberté.
Source d'information
- Site web de l'île de Saint-Martin
- Site web de la 1ère, Portail des Outre-mer
- Site web de la collectivité de Saint-Martin
- Site web du CEFAN de l'Université de Laval