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François Makandal, un précurseur légendaire de la Révolution Haïtienne.
©FME
Genre
Homme
Naissance
1700
Décès
1758
Activité
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Nègre Marron

Le 20 janvier 1758, François Makandal, « nègre marron » révolté contre le pouvoir colonial français, est condamné à mort et brûlé vif en place publique au Cap-Français, capitale de la colonie de Saint-Domingue. Le souvenir de sa révolte hantera l’île jusqu’au soulèvement de 1791, qui conduira 13 ans plus tard à l’indépendance de Haïti.

De nombreuses sources d’époque mentionnent François Makandal. Il serait issu du peuple Kongo, déporté depuis l’Afrique dans la colonie de Saint-Domingue. Présenté par certains comme un musulman, ou plus certainement comme un houngan (prêtre vaudou), il connaît les plantes et leurs propriétés, et utilisera ce savoir à Saint-Domingue. D’après Moreau de Saint-Méry, il aurait commencé par être esclave dans une plantation au nord du pays, où il aurait perdu une main dans un moulin à sucre. Il s’enfuit, et devient un « nègre marron », qui pendant plusieurs années va terroriser les colons.

Maître des poisons, il alimente les trois grandes peurs des propriétaires dans le monde colonial : la mort du bétail, la destruction des champs de cannes à sucre, et le meurtre par empoisonnement. Réputé insaisissable, voire immortel grâce à des pouvoirs surnaturels, il défie le pouvoir colonial, au point où certains virent en lui un précurseur de Boukman, le leader du soulèvement de 1791, et de Toussaint Louverture. Sa réputation d’empoisonneur est telle que, dans le langage populaire, un « macandal » finit par désigner tout sac contenant un produit toxique. Son aventure durera plusieurs années (entre 4 et 18 ans selon les chroniqueurs), et s’achèvera alors qu’il participait à une calenda (une fête d’esclaves). Trahi, il est arrêté et jeté en prison.

Accusé de « séduction, profanation et empoisonnement » par le tribunal du Cap Français, il est torturé et condamné à être brûlé vif sur un bûcher. Souhaitant anéantir son influence, le pouvoir colonial fait de cette exécution un grand spectacle, auquel les esclaves du Cap Français sont sommés d’assister. Mais les circonstances tumultueuses de son exécution le projetteront définitivement dans l’imaginaire collectif à Haïti et dans le monde. En effet, après l’embrasement du bûcher, Makandal se débat tellement qu’il rompt ses liens et tente de s’échapper dans la foule, couvert de flammes. Rattrapé, il est ramené au bûcher et brûlé pour de bon, mais le récit mythique, qui triomphera du récit historique dans les mémoires collectives, raconte qu’il s’envola après s’être transformé en insecte en criant « je reviendrai ».

Symbole du « nègre marron » qui se libère lui-même et menace l’ordre colonial, chargé des mystères de la religion vaudou et du souvenir de l’Afrique, grandi par sa fin légendaire, Makandal a fasciné des générations d’artistes, de l’écrivain cubain Alejandro Carpentier, qui le réinvente en magicien métamorphe dans Le Royaume de ce monde en 1949, jusqu’aux développeurs des jeux vidéo Assassin's Creed III: Liberation et Assassin's Creed: Rogue, en passant par Gaël Faye qui le cite dans sa chanson Tôt le matin.